Voilà, nous sommes installés aux Arcs. Après la bourgeoise Bologne, protégeant son opulence sous de sombres enfilades d’arcades, la quiétude lumineuse d’un village varois. Ça tombe bien, j’avais envie de campagne et j’ai toujours aimé la Provence. Souvenirs éblouis des étés de mon enfance : Bormes les Mimosas, la Croix Valmer, les oliviers, les cigales, les pins parasols.
Je prends le temps de découvrir ce nouvel environnement. Dix ans que je n’ai pas vécu en France.
Après un mois de Septembre très agité, je me rééquilibre, je m’acclimate. J’observe, j’apprécie l’ambiance des lieux.
Nous n’avons toujours pas Internet à la maison. Il semble que cette installation, banale et rapide en Italie, soit ici longue et complexe. Jour après jour les difficultés se succèdent : pas de ligne, pas de prise, pas de serveur, des techniciens envoyés par France Telecom, sous-traitants, qui installent un boitier dans le garage mais pas au salon, avant de partir ils me demandent d’exprimer par écrit un jugement sur leur prestation. Que dire ? « Pas sur notre travail, me précise le charmant jeune homme, sur nous, si nous nous sommes bien comportés. »
En gros on demande au client de moucharder. J’écris « satisfaite », les techniciens ont été polis, ils n’ont pas craché par terre ni pissé dans le jardin. Seul problème, je n’ai toujours ni téléphone, ni Internet.
Pazienza !
En attendant, nous nous connectons sur la place du village, sous les platanes, assis devant un café le matin et une bière l’après-midi. Mais mon ordi n’est plus tout jeune, il n’a guère d’autonomie. Le temps de lire les mails et hop, black out.
Pas grave, cette pause est bénéfique. Moins écrire sur le web me permet de plus réfléchir et puis, j’ai beaucoup de choses à faire.
Aménager le nouvel appartement.
Disposer chaque objet à sa place idéale, c’est-à-dire la plus suggestive, là où il me parle, m’adresse un clin d’œil, déclenche un souvenir.
Me promener dans le village.
Explorer le marché du jeudi matin.
Discuter avec les gens que je rencontre : les voisins charmants, les commerçants aimables.
Ratisser le jardin. Chercher les tortues dans les buissons, leur déposer des feuilles de salade.
Ecouter la radio. Branchée sur France Inter. Tout n’est pas bon, loin s’en faut, mais certaines émissions éveillent l’intérêt.
Sur le net, prise par trop de sollicitations je n’écoutais jamais (disons très rarement) “Là-bas si j’y suis“, de Daniel Mermet. Maintenant je m’en délecte. C’est le rendez-vous de l’après-midi.
Je me rapproche d’une conclusion sur laquelle je médite depuis quelques jours : Internet favorise l’éparpillement des informations et des idées. Tout au moins en ce qui me concerne. Souvent, je ne trie pas assez mes lectures. Je dévore, je me goinfre superficiellement d’une énorme quantité de phrases, de mots que d’autres ont écrits et qui forment un magma brumeux, enchevêtré, qu’illuminent heureusement quelques perles de lucidité, d’intelligence, de culture, d’émotion.
J’espère avoir la sagesse future de me garder de cette boulimie de lecture qui embrouille plus qu’elle n’éclaire.
Pendant trente ans j’ai vécu avec mes enfants : un, puis deux, puis trois et à nouveau un, enfin plutôt une, ma fille, ma princesse, mon ange, mon oiseau ou ma poule suivant les moments et les humeurs.
Nous ne vivrons plus ensemble.
C’est un juste cheminement.
Si parfois je ressens un peu de nostalgie, je ne suis pas triste. J’ai confiance.
Une nouvelle période de ma vie, qui n’a pas été linéaire, commence. Je sais qu’elle mène vers la vieillesse mais peu importe j’ai encore tellement à faire, à découvrir, à observer, à aimer, à lire, à écrire.
21 commentaires sur “Acclimatation”
Profite de la chance que tu as eue de déménager au bon moment…
@Fajua
Salut ma belle!
Oui, j’ai de la chance, je le sais.
Pour toi, une belle citation:
« Mais la vie est ainsi, depuis toujours, et tout en fait partie : douleur, séparation et nostalgie. Il faut la prendre comme un tout, et trouver tout beau et bien. […] S’il y a des couleurs et des formes comme celles-là, alors, la vie est belle et digne d’être vécue, n’est ce pas ? […] Dans la vie sociale comme dans la vie privée, on doit tout prendre avec calme, générosité et un petit sourire aux lèvres. » Rosa Luxembourg
quand je suis revenue de Tournai, après avoir accompagné Cléo, j’ai entendu la fin de cette phrase sur France Inter, plusieurs fois, pour présenter le spectacle : Rosa la vie.
Et à chaque fois, je me disais : “Il faut que je m’en souvienne, il faut que je m’en souvienne…”
Je ne l’ai pas oubliée, enfin pas complètement. Je m’en souvenais juste assez pour la retrouver sur Internet, dans un très intéressant article d’Edwy Plenel
http://www.mediapart.fr/club/blog/edwy-plenel/290909/rosa-luxemburg-vivante-en-partenariat-avec-mediapart
on se voit bientôt 🙂
baci
Pour BiBi, Celeste habite désormais aux Arcs ( en Ciel !!)
La Provence va te faire garder des couleurs à tes articles.
A bibientôt de te lire.
@Celeste : “Souvenirs éblouis des étés de mon enfance : Bormes les Mimosas, la Croix Valmer, les oliviers, les cigales, les pins parasols.”
Toi aussi ! Décidément, encore un point commun. Moi aussi, la Croix Valmer et Saint Tropez (celui de l’époque), Ramatuelle, la route avec un pin parasol au milieu et qui passe de chaque côté, pas de rond point en béton, cette même route qui finit dans le sable et non sur des caniveaux “aménagés”, comme une bande qui excuserait la nature en prenant le moins de terrain possible, …
Bref, je retrouve dans l’inde actuelle le midi de mon enfance, 40 ans plus tôt.
Bises !
Welcome back en France !! Si tu viens à Paris, déjeunons ;))
Je suis d’accord avec toi sur le fait qu’internet est victime du “trop d’infos tue l’info”. Choisir plutot que “courir”
ravie de te relire
(Oh my god, j’ai fait des rimes sans le vouloir!)
Bienvenue en France
@Salut Bibi
avec un peu de chance, Internet cette semaine!
@zolive
“Bref, je retrouve dans l’inde actuelle le midi de mon enfance, 40 ans plus tôt.”
Tout à fait. Je ne pense pas être passéiste mais j’ai l’impression (et plus) qu’en occident nous avons dépassé le stade du “bien être” , de la vie tranquille et sereine pour tous.
Nous avons raté le coche. Le pire c’est que certains n’ont pas, ou à peine, connu et apprécié l’embellie.
Et hop, les injustices sociales ont repris du poil de la bête avec l’exclusion, la pauvreté…
En Inde, tout est encore possible.
Allez, une super citation, rien que pour toi:
“En Inde, on a encore cette profusion de la pensée et de l’imagination…. Dans les pays d’Occident, on a l’impression que tout est en code barres, et qu’il faudra beaucoup d’imagination pour casser cela. À l’ouest, les gens se battent pour revenir à une sorte de désordre de la pensée. Ici au moins, en Inde, nous avons encore cette sauvagerie, cette inefficacité, ces choses qui marchent mal, cette imprévisibilité, cette folie… En marchant dans la rue ici par exemple, on ne peut pas se dire : tiens, celui-ci a un short de chez Gap, et ce sari-là la vient de chez Banana Républic. Non, c’est le désordre, c’est la profusion, c’est terrible, c’est beau ! ».
Arundhati Roy
Baci
@coucou Bellâm
certainement nous irons à Paris, quand, je ne sais pas mais le déjeuner avec toi…yeeesssss!
baci
@merci jardin!
imagine-toi que j’ai à ma disposition un bout de terrain autour de la maison…pour l’instant j’ai passé un prudent coup de râteau en me demandant ce que j’allais bien pouvoir y faire et j’ai pensé à toi 😉
ceci dit je ne crois pas qu’il soit possible d’en faire un petit potager…quoique…
A propos de Rosa La vie
Les lettres de prison de Rosa Luxembourg lues par Anouk Grinberg . C’est ahttp://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture/emissions/theatre_europe/index.php
j’avais pas fini ma phrase : c’est absolument bouleversant. On peut encore l’écouter ici :
http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture/emissions/theatre_europe/index.php
Un conseil… évite de retourner à Bormes-les-Mimosas ou à la Croix-Valmer, garde les souvenirs… c’est deve nu horrible, encore plus laid qu’Antibes, c’est dire !! Plus d’oliviers, de caroubiers, juste des immeubles, des kilomètres d’immeubles dans un style faussement provençal, et du monde partout… par un m carré de libre sur la plage grise.
Bises; à bientôt sûrement
Et c’est parti pour une nouvelle aventure…
Si tu as besoin de conseils de jardinage… donne moi des détails sur ta terre, la surface, le temps que tu veux y consacrer, l’eau dont tu peux disposer, ça me plairait bien de t’aider. Cultive au moins les aromates, ya pas besoin de beaucoup de place et c’est le bon moment pour les plantations: thym, romarin, sauge, sarriette, estragon, origan…
Puisque tu as un marché, cherche un producteur de plants sympa…
@celeste, merci pour la citation d’un auteur que j’apprécie (elle est parfois conspuée).
Et bonne installation à toi et Fabio.
Oui, évites les Saint tropez, Croix-Valmer, Bornes les Mimosas, foncez plutôt dans l’arrière pays, où c’est bon la nature. 🙂
@jardin
oui, oui, j’ai besoin de conseils!
le thym et le romarin, j’ai déjà, superbes.
la terre? sèche
l’eau? pas de pb, il y a un tuyau d’arrosage, facile
temps? une heure par jour (cad parfois un peu plus parfois un peu moins)
mon père, qui s’y connaît, est venu dimanche. D’après lui je peux planter du persil et autres zerbettes, des radis, de la salade.
et aussi comme fleurs, des iris, des jonquilles, des impatiences
pour le reste c’est difficile car nous partons tout l’été (deux mois) et je ne sais pas encore si pourrai trouver qq pour arroser et entretenir pendant notre absence.
tes suggestions sont les bienvenues. Pour l’instant j’arrache, je coupe, je jette. Mais il faut encore que j’achète du matériel (gants, bêche, pioche…etc)
par contre le marché est hors de prix, il va falloir que je trouve les plants ailleurs
je suis très contente de ce bout de jardin, une nouvelle aventure 🙂
@kelcun
merci pour le lien, malheureusement, je viens juste d’avoir internet à la maison…trop tard 🙁
@Annie
et oui, à bientôt 😉
@Zolive
je suivrai ton conseil
baci à vous 4
@salut Mohamed
I am back sur le web 🙂
Ravie de te savoir installée, et heureuse ici.
arrivée par hasard et très contente….moi, j’ai l’añoranza de l’espagne, mais j’adore paris (et j’y suis). Internet en espagne une galère, et super cher, commandé sur le site en france depuis madrid et fonctionnant le jour même de notre arrivée. Espèrons que pas de soucis…Vu anouk grinberg il y a qques jours, magnifique (commenté sur mon blog).
J’apprends l’italien (dur dur avec l’espagnol) et je voyage à travers la littérature, en particulier les polars,
plus faciles à lire, et viens de finir cos’é accaduto alla signora perbenne de macchiavelli,qui se passe à bologne, dans les années 70. Suggestions bienvenues….
@merci Fauvette 🙂
@marsupilamina
et oui, de ne pas être à Paris, on perd des spectacles, Rosa la vie, j’aurais vraiment aimé.
baragouiner l’italien n’est pas difficile, le parler parfaitement est une autre paire de manches!
après dix ans en Italie, il m’arrive encore de faire quelques fautes, toujours les mêmes bien sûr!
autre problème, les parlers locaux…quand je suis à Bari et que 2 “Barese” parlent entre eux, je ne comprends rien, ou presque!
idem avec les Siciliens!
par exemple, j’ai beaucoup de mal à lire Camillieri en Italien.
sinon dans la catégorie polar, j’aime bien Lucarelli, lui aussi de Bologne, Marcello Fois, Faletti aussi se lit facilement.
sinon, j’aime bien Niccolo Ammaniti, Suzanna Tamaro, Dacia Maraini
Les Arcs? mais c’est superbe! Ya même la momie de Sainte Roseline!
il y a un livre +CD d’anouk grinberg (éd de l’atelier) mais pas vu de DVD…sinon en polar, j’aime bien aussi carofiglio (et les livres sont très jolis), j’ai acheté un erri de luca (j’en ai d’autres en français) et un d’ammaniti. Mon souci, je comprends assez bien et je réonds en espagnol (il y a une porte de mon cerveau qui grince). Mes enfants à moi sont partis depuis un bon moment (deux fois grand mère, génial): mais le but de l’éducation c’est qu’ils s’en aillent, donc, n s’y fait….
@bonsoir Hermès
En voilà une bonne nouvelle!
@Marsupilamina
Erri de Luca est un écrivain majeur, j’ai adoré plusieurs de ses livres.
j’aimerais bien être grand-mère 😉
Je suppose qu’il faudra que je remonte plus loin dans les archives pour connaître la raison de ce retour en France 🙂
Plus proches, désormais, enfin un espoir de se revoir ?
Je vous embrasse tous deux !
(chez nous, ça y est, ma mère est grand-mère depuis la nuit dernière … et moi tata ! je te le souhaite!)