Berlusconi, Bunga Bunga et abus de pouvoir

Bunga bunga, c’est ainsi que le Président du Conseil italien nomme les « divertissements » qui clôturent les soirées privées dans sa villa d’Arcore. Le nom vient  d’un jeu sexuel enseigné à Berlusconi par  Khadafhi. Et oui, pendant que des immigrés, femmes, enfants, hommes ayant tenté en vain de rejoindre les côtes italiennes dépérissent, affamés et torturés, dans les camps de rétention libyens, le Colonel explique au Cavaliere comment il se distrait dans son harem!

Bunga bunga, quand elle y participe, Ruby a 17 ans. Marocaine, vivant en Sicile, elle a participé quelques mois auparavant à un concours de beauté. Dans la salle, Emilio Fede, journaliste, directeur du journal télévisé TG4, intime de Berlusconi, venu chercher de la chair fraîche. Il convainc  la jeune fille, déjà en rupture avec son milieu familial, de le suivre à Milan. Facile d’imaginer les promesses de gloire et d’argent facile.
Très rapidement, la jolie jeune fille aux traits encore enfantins filmée lors du concours de beauté devient une créature artificielle, maquillée à outrance, décolorée, perchée sur d’interminables talons, cambrée à outrance. Comme Zahia, autre gamine pauvre, entrainée dans un tourbillon autant sordide que clinquant. Mais alors que cette dernière se spécialise dans le joueur de foot, Ruby, par l’intermédiaire de Lele Mora, un répugnant personnage gravitant dans le monde des « stars », accède aux salons privés du Président du Conseil.

Bunga bunga, raconte la jeune fille, minimisant sa participation en précisant qu’elle était la seule femme à ne pas être nue et qu’elle pas eu de relations sexuelles avec le Cavaliere. Parmi les invitées, indique Ruby, deux ministres.

Bunga bunga, un chef d’Etat vieillissant se repaît du spectacle de la jeunesse dénudée et offerte. «J’aime la vie, j’aime les femmes » déclare-t-il, bravache, aux journalistes.
« Je suis orgueilleux de mon style de vie. J’ai une vie terrible, des horaire inhumains. Je suis une personne joyeuse,  et si de temps en temps je ressens le besoin d’une soirée de détente comme thérapie mentale pour me nettoyer le cerveau de toutes les préoccupations , personne, à mon âge , ne me fera changer de style de vie

Bunga bunga, le Cavaliere, en plus de ces relations pour le moins troubles avec une jeune fille mineure qui aurait reçu 150 000 euros de sa part,  a pourtant commis une erreur qui pourrait lui couter cher. En mai dernier, la police milanaise arrête pour vol Karima El Mahroug, alias Karima Heyek, alias Ruby Rubacuori, mineure, sans papiers, ayant fugué d’un communauté où elle avait été placée après la rupture avec sa famille. Ô surprise, dans la soirée, un appel téléphonique de Berlusconi himself, demande aux policiers de libérer la jeune fille en la confiant à  une certaine Nicole Minetti, l’hygiéniste buccale (ça ne s’invente pas!) du Cavaliere, propulsée conseillère régionale de la région Lombardie auprès de la présidence du conseil des ministres. En effet, précise Berlusconi au téléphone, la jeune fille n’est pas une simple gamine marocaine délinquante mais la nièce d’Hosni Mubarak !!!
Effrayés, leur interlocuteur les menaçant d’être responsables d’un incident diplomatique, les policiers obtempèrent et deviennent complices de l’intervention illégale du chef de l’état. Par un tour de passe passe, ils n’appliquent pas les dispositions du juge qui ordonnent de remettre la jeune fille à une communauté protégée et la confient à la fameuse Nicole Minetti.
Abus de pouvoir, clair et net!
Quant à l’incident diplomatique, il est en cours, l’ambassade d’Egypte s’étant tout récemment indignée de ce mensonge éhonté.

Bunga bunga, dans un premier temps Berlusconi nie toute implication, puis, « la faccia come il culo » (la face comme le cul), se dédit et déclare « Je suis une personne qui a du cœur et j’agis toujours pour aider qui a besoin d’aide », puis passe à l’attaque « Ce sont des ordures médiatiques » et accuse, comme d’habitude, la gauche et les médias.
Appuyant ces propos malsains, Libero, un journal pro-gouvernemental titre « Ci risiamo con la gnocca » qu’on peut traduire comme « Encore des histoires de chattes ». Vulgarité et mépris.

Bunga bunga, en Italie, la désapprobation monte et le journal  Famiglia Cristiana, écrit «  le Premier est malade, c’est triste et pitoyable » , son ex femme, Veronica Larrio l’avait déjà dit, accusant son mari d’avoir des relations sexuelles avec des mineures. « Il est incroyable, continue le journal, qu’un homme de ce niveau n’ait pas l’auto contrôle nécessaire. Et que son entourage soit là à le regarder. »
Cet ultime épisode, toujours d’après le journal, minerait « la crédibilité, mieux encore, la dignité, de l’homme qui gouverne le pays ».

Dans un pays en souffrance, économiquement malade, gangréné par la mafia, ce nouveau scandale entache encore un peu plus la réputation du président du conseil.
Sera-t-il la goutte d’eau qui fera réagir les Italiens, qui les poussera à s’insurger, à réclamer et obtenir la démission d’un vieillard malfaisant, obsédé par le sexe et le pouvoir ?

Chi lo sa (qui sait) mais on peut l’espérer.

Sources: la Repubblica, il Messaggero, Il Tempo, Famiglia Cristiana

La vidéo humoristique qui fait actuellement un tabac en Italie:

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