La peste verte se répand dans la ville. Verte, comme les drapeaux de la Lega.
La cité rouge, orgueil de l’Emilie Romagne, la ville de des « dottore », de la bonne chère et des parcs où l’on dansait le mambo, se dégrade et se referme sur elle-même.
Il y a an le maire PD (parti démocrate), quittait piteusement un siège depuis peu gagné. Une histoire de sexe, de pouvoir et d’argent, d’une banalité à pleurer. L’élu avait utilisé les fonds public pour financer weekends et voyages luxueux avec sa maîtresse, une blonde botoxée qui, a peine abandonnée, avait couru s’épancher dans les médias.
Autant dire que la crédibilité du PD local a pris un mauvais coup. Sur le plan national on ne peut pas non plus dire que ce soit une période faste, la gauche molle italienne patine, hoquette, tergiverse et ne séduit plus.
Après avoir été, pendant un an, gérée par une administratrice nommée par l’état (comme un vulgaire village maffieux sicilien), la ville se prépare pour de nouvelles élections municipales.
Ces dernières années, le berlusconisme a produit à Bologne les même dégâts que dans le reste de l’Italie. Chômage des jeunes (particulièrement les diplômés), loyers exagérément élevés, coût de la vie en constante progression, consumérisme effréné, alcoolisme des adolescents….la liste est longue.
Les étudiants, jadis force vive de la ville, se sont éloignés du militantisme politique de gauche. Ils l’ont remplacé par une consciencieuse consommation de bière, de vêtements de marque et de soirées festives.
Alors la Lega, escortée de Forza Nuova (parti ouvertement néo-fasciste), a investi les rues, les places, les locaux, les universités, les esprits chagrins et xénophobes.
Même si la coalition de gauche, portée par Virgilio Merola devrait remporter la mairie, l’extrême droite est devenue incontournable.
Sa campagne est lancée et ses armes particulièrement abjectes.
Ci-dessous deux affiches, la première vient de la Lega Lombardie, la deuxième, modifiée, a été placardée à Bologne.
Face de citron, romanichelle en jupon et son rejeton, bamboula et émule de Ben Laden, voilà comment sont représentés les immigrés (Manque la pétasse ukrainienne, a écrit, d’un trait d’humour acide, un participant d’un forum de gauche- la “badante” venue de l’Est pour torcher les fesses du nonno!). Des étrangers menaçants, alors que dans les faits ils sont extrêmement utiles à une économie chancelante. Mais qu’importe la vérité!
Le pape appelle à l’accueil des étrangers mais dans l’ombre des potentats catholiques soutiennent la Lega. La Mafia progresse. Le Président du Conseil, vieil ogre pervers symbolise la triste décadence d’un pays d’artistes,de voyageurs, de philosophes.
Mauvaise passe pour l’Italie mais rien n’est immuable tant qu’écrivent les poètes:
“S’il naissait aujourd’hui, il serait sur un bateau d’immigrés, jeté en mer avec sa mère en vue des côtes des Pouilles ou de la Calabre.
Peut-être continue-t-il à naître ainsi, sans survivre et le 25 décembre n’est-il seulement que le plus célèbre de ses anniversaires.”
Erri de Luca
6 commentaires sur “Bologne du rouge au vert”
Hélas, c’est désespérant de voir comme la droite et l’extrême droite gagnent toute la société. il n’y a plus rien de rationnel là-dedans.
Belles paroles d’Erri de Luca.
J’ai toujours pensé à ça: s’il naissait aujourd’hui à Bethléem, il serait enfermé derrière un mur ou derrière des barreaux. Plus personne ne peut prononcer impunément des paroles de paix et de fraternité dans un monde où la guerre chez les autres semble répondre à (pratiquement) toutes les attentes.
c’est un monde effrayant, égoïste, haineux…
Hier, cette liesse pour célébrer la mort d’un homme et on parle de justice alors que c’est l’application de la loi du talion
De 1992 à 2011 (19 ans) Al Qaida a fait provoqué la mort d’environ 10 000 personnes, bien sûr c’est totalement injuste et c’est beaucoup trop mais pendant ce temps, combien d’innocents ont été victimes de la lutte contre le terrorisme? Ziegler dit qu’un enfant meurt de faim toutes les 5 secondes, ça en fait des morts en 19 ans!!
on ne pourrait pas lutter contre la faim, contre les inégalités au lieu de massacrer?
Il y a ça, pourtant:
http://www.slate.fr/video/37253/berlusconi-nabucco-verdi-riccardo-muti
Et ça:
http://www.lepost.fr/article/2011/04/30/2481228_bizarre-ni-la-presse-ni-la-radio-ni-la-tv-n-en-ont-parle-et-pourtant.html
Aucun des deux articles, presque semblables, ne dit la tête que faisait berlu, dommage.
salut!
merci pour les liens, c’est superbe!
c’est chouette que cette vidéo tourne encore, moi je l’ai vue en mars et elle continue son chemin
Bjr,
Tu nous tiendras au courant des résultats ?
En tous les cas, je me souviens de l’Italie mobilisée et très politisée d’il y a trente ans. Des pans entiers de la Jeunesse semblent se réfugier aujourd’hui dans le consumérisme pour ceux qui ont la tête hors de l’eau et réduits au chômage et à la rapine pour ceux qui plongent.
Il semble – un peu comme en France – que la transmission et le souvenir des luttes ont connu des fortunes malheureuses et qu’on en est à l’ère libérale de “Débrouille-toi tout seul”…
Quel sombre tableau… Et dire que la gauche italienne est devenue un modèle pour le PS français…