On fait ce que l’on veut d’un souvenir. On peut longtemps après en goûter encore la saveur. En garder soigneusement la beauté pour pouvoir la restituer, dans toute sa joie et sa tendresse, comme un rayon de soleil illumine un jour de grisaille.
On peut aussi laisser le temps et l’humeur fluctuante effacer les images , la mélodie des rires et des émotions. Ou les déformer, ajoutant parfois des ombres nouvelles à des instants de bonheur, créant des doutes là où n’y avait qu’une harmonie paisible et que chacun a, parfois fugacement, ressenti.
Le souvenir des quelques jours qui viennent de s’écouler, je veux le garder intact, il est précieux.
D’abord il y a eu la route sous le soleil. Comme en prélude, pour avoir le temps d’imaginer les retrouvailles et les nouvelles rencontres.
Elle déroulait ses courbes sur les monts auvergnats. A Aubenas, mon enfance subitement se réveille. C’était la route des vacances. Cap vers le midi et on prononçait « Aubenasse » pour faire chanter le nom. Passé Valence, c’est le sud. Quand on vient du Berry on en guette tous les signes.
Puis il y a eu des embrassades et des éclats de rire. Des verres levés et prestement vidés. Le vin était bon et que dire de la bière directement arrivée du nord !
Sans t’avoir jamais vu(e) je t’ai toujours connu(e). C’est une évidence.
Car c’est sur nos idées que nous sommes rassemblés. Le monde que nous voulons est possible, la preuve nous sommes là et nous en esquissons les contours. Liberté, justice, dignité humaine pour toustes, des lendemains joyeux et l’art à portée de main.
Créer du bonheur pour éloigner le malheur qui rôde et combattre les loups, déjà prêts à entrer dans la ville, qui aiguisent leurs crocs.
Jouer avec les enfants insouciants, cajoler un adorable bébé.
Chanter sur les accords d’une guitare, en majeur ou en mineur mais toujours du fond du cœur. Des chansons presque oubliées qui parlent de liberté, de lutte, d’amour, de la jeune fille du métro et des camionneurs qui sont sympas.
Partager les repas. « L’homme riche, c’est celui qui ne mange pas seul à table » dit un vieux proverbe africain. Nous étions pleins aux as, attablés tous ensemble.
« Dans le noir, les sourires se voient ». Ils illuminent la nuit et même si l’on a un peu froid on ne va pas quitter sa place et rompre les discussions qui ricochent d’un bout à l’autre de la tablée.
Marcher sur des chemins bordés de pensées sauvages, donc libres, en se racontant des bribes de nos histoires. Des douleurs et des joies. Les épreuves surmontées. Les projets et les rêves.
De quoi croire, encore et toujours, que l’on peut vivre autrement, que la pauvreté, l’injustice, l’étouffement ne sont pas inéluctables.
« C’est tout notre fond commun, ce désir, cet élan tu sais bien ! »
Des embrassades encore – parfois « avec toute mon affection » n’est pas une vaine formule car on ne la dit pas, on la vit- avant de nous éparpiller, aux quatre coins de l’hexagone.
Et moi, emplie d’un désir d’écrire renouvelé, forte et fière de savoir que nous sommes nombreux à aspirer à un monde pacifié, que nous sommes forts et joyeux et qu’il ne tient qu’à nous d’être invincibles.
26 commentaires sur “En majeur ou en mineur”
Sourire 🙂
Merci à toi de l’avoir mis noir sur blanc! 😉
Des fleurs même pas majeures, c’est une honte ! 😉
Une bien jolie émotion, tes mots, Céleste, “écrire le bonheur tout simple, de peur qu’il ne se sauve” …
ne comprends rien, sauf que ton bonheur fait plaisir à lire
Bon, ben, merci Céleste. C’est comme si j’avais pu être là.
Bonjour à tous. Je vous embrasse.
“Sans t’avoir jamais vu(e) je t’ai toujours connu(e). C’est une évidence”
Tu vois Celeste, c’est très exactement cette idée-là (qui n’était qu’un simple et misérable pari, mais ma seule graine de départ) qui m’a extrait d’une ornière solipsiste infernale, il y a un paquets d’ans …
Je vis toujours sur ce genre de pécule inépuisable, en fait …
Parier le meilleur le rend un peu plus probable, infinitésimalement, c’est certain, mais avec de la patience, cela “gauchit” la chute, et la pesanteur alors se trouve doublée par l’arabesque
🙂
@Patrick
Bonne remarque.
La prochaine fois, elles seront peut-être phrygiennes …
😉
@Fajua
à toi aussi 🙂
en attendant d’entendre ton rire!
@Valdo
Noir, blanc, comme les chats de Kusturica 🙂
@Patrick
heureusement tu es là pour prendre la défense des pensées 🙂
@Agathe
Très jolie phrase 🙂
ou encore:
“Le bonheur est dans le pré,
cours-y vite, cours-y vite
Cours-y vite il va filer!”
@Merci Brigetoun
@Le yéti
La prochaine fois alors 🙂
@Chomp
C’est bien ce que je pensais, j’ai tout compris 🙂
et j’aime beaucoup.
“Parier le meilleur le rend un peu plus probable,”
Oh oui!
Ceux qui s’interdisent le bonheur ont toujours été les plus dangereux. Cours, cours, Céleste! Sur les sentiers inconnus, les connards tu ne les recontres pas.
Vieille chanson: “A l’amitié, l’amour, la joie”.
Quoi d’autre?
Céleste, il va falloir que tu me racontes tes plans rencontres, parce que, moi, de mon côté, j’ai passé un week-end épouvantable 😉
En tous cas, et sérieusement, très beau texte, Céleste, et j’adhère, ô combien! 🙂
Oui, le Yéti, la prochaine fois, hein?
Céleste t’es trop forte !
“Mais qu’à c’la n’tienne: c’est pas fini
On peut chanter quand le verre est bien rempli…..”
1. Ici comme ailleurs, Voyage et Métamorphose vont de pair. C’est peut-être d’ailleurs une seule et même chose.
Et vivre, n’est-ce pas participer à un voyage et à une métamorphose (dont on ne discernerait ni l’origine, ni la fin) ?
2.Route vitale : en permanence, sur nos bordures, des Bornes signifiantes : pour toi, Aubenasse, le Berry… Et tant d’autres qui s’y rajouteront.
3. Partager avec l’Autre les grandes Rumeurs du Printemps mais maintenir en nous le Silence estival des choses secrètes.
4. Bibi plaint ceux pour qui le Voyage n’apporte plus rien. BiBi plaint ceux qui – sans partir – qui reviennent de tout. 🙂
Correction : “Bibi plaint ceux pour qui le Voyage n’apporte plus rien. BiBi plaint ceux qui – sans partir – reviennent de tout. :-)”
Voui, tout ça fait un bien fou hein?
Heureuse de vous pour vous
Savoir se rencontrer n’est pas donné à tous
C’est fragile, une rencontre, c’est délicat
Souvent trop pour moi
Bravo à vous !
@Hermès
“Buvons encore, une dernière fois
A l’amitié l’amour la joie
on a fêté nos retrouvailles
ça me fait de la peine
mais il faut que je m’en aille” (Graeme Allwright)
Je vois que nous avons, sans surprises, les mêmes classiques!
et ça continue avec
@Myriam 🙂
« Mais qu’à c’la n’tienne: c’est pas fini
On peut chanter quand le verre est bien rempli….. »
merci ma belle:-)
@emcee
Oui, un beau plan rencontre 🙂
J’attends déjà la prochaine édition!
@Bibi
“Et vivre, n’est-ce pas participer à un voyage et à une métamorphose (dont on ne discernerait ni l’origine, ni la fin) ? ”
Si, si, si, je confirme. C’est bien un voyage.
@Westmalle
alors hier soir, à l’apéro, nous avons débouché une délicieuse petite blanche et l’avons bue à ta santé 🙂
@La plus belle des Sardines masquées du port de Marseille a raté les agapes.
Prochaine fois?
Baci à toustes!
;-))
Prolonger de si beaux moments, de si belle manière… Merci.
@Bcool
Et ça dure depuis des z’ans,
Terre promise, chose dûe,
récidive assez inéluctable,
je pense …
@Emcee
Un horreur, hein !
:-))
@ Chomp: total accord 😉
fragiles et intenses moments si bien décrits 🙂
les pensées sauvages essaiment aux quatre vents la liberté qui les nourrit.
C’est très beau et bien écri avec une écriture pleine d’émotion pudique et de sensibilité profondément antique. Quel talent de savoir saisir au vol l’instant fucace et l’apprivoisé pour se le réappropirier et nous le restitués en mots si agréables à lire.
Ne vous arrêtez pas surtout.
mercmercimerci 🙂
et bienvenue à Bcool, Rififi et Garancuba!
Pas de soucis, je n’ai pas l’intention de m’arrêter!
Résister,inventer, c’est exister!
Baci à toustes!
J’ai loupé un truc là, y’avait un super rendez-vous à Aubenas sans que j’y fusse invité ?!? Damned !
Très beau Celeste, et c’est la ville de mon berceau familial maternel, te rappelles-tu ?
Bises
salut zolive:-)
Effectivement , le dernier we a été…magnifique!
Du coup je suis pleine d’énergie!
et puis dans un mois : INDIA!