Johny
L’année dernière, lorsque j’avais donné deux heures de leçon de français
aux élèves du Jamal Mohamed College de Trichy, j’avais écrit mon e-mail
au tableau et incité la centaine de garçons à qui j’avais peu avant fait
chanter une interprétation très personnelle de l’alphabet de Mozart, à
m’écrire. Un seul l’a fait : Johny Basha.
Un sportif Johny, à 20 ans il est champion de tennis de son école et
champion national de tir.
Un beau mec Johny, physique de jeune homme comme on les voit à la télé,
il ne porte ni la moustache ni la chemise à carreaux et certainement pas
le dhothi.
Un mec sérieux Johny, mais pas trop. Il étudie l’informatique, et, a une
girlfriend, fait rare chez les jeunes indiens en général et rarissime
dans la grande ville provinciale de Trichy.
Son père est serveur dans un restaurant et sa mère ne travaille pas.
Leur appartement est tout petit, on nous y reçoit avec une délicieuse
gentillesse. Johny est fils unique et visiblement tous les efforts des
parents se sont concentrés avec bonheur sur lui.
Il est bien élevé et respectueux. Il est musulman mais avec un certain
recul, il parle plus de sa foi que de la religion.
Taoufik
Après observation je peux diviser les hommes du sud de l’Inde en deux
types morphologiques distincts : le petit costaud (ou gros suivant les
cas) et le moins petit maigre, qui, avec l’âge, prend du ventre, mais
seulement du ventre. De dos la silhouette reste la même : hanches
étroites, petites fesses plutôt plates, longues jambes maigres toutes
droites style allumette, de face une protubérance ventrale rebondit sur
la ceinture du pantalon, l’archétype en est l’acteur tamil Rajini.
Taoufik, le pote de Johny appartient à la deuxième catégorie.
Il a un beau visage aux traits doux et réguliers, les cheveux
indisciplinés et une barbe naissante. |
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Les deux sont amis depuis toujours et ils semblent se
compléter, le calme de Taoufik modère l’impétuosité de Johny dont
l’enthousiasme sort Taoufik de sa réserve.
Il étudie le commerce et veut devenir riche. Jadis sa famille a eu
beaucoup d’argent, son trisaïeul possédait une partie de la ville et a
crée le Jamal Mohamed College. Mais la richesse n’a pas survécu au
défilé des générations et Taoufik nous confie que ses parents sont
pauvres.
Il est beaucoup plus attaché aux traditions et à la religion que son
ami. De tous les jeunes gens que nous avons rencontrés
jusque là Johny et Taoufik sont ceux qui ressemblent le plus aux
occidentaux du même âge, il sont différents de Venkatraname, l’adorable
garçon un peu bêta de Kumbakonam et d’Ahmed Riaz, le jeune intello du
train de Mayanoor. Mais tous ont un point commun, une extraordinaire
disponibilité mêlée à une infinie gentillesse et à une immense
curiosité.
India, le 19 juillet 2006 (...
à suivre) |