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Le pays où les pauvres sont obèses…

C’est le titre d’un article de l’Hindu du 29 Juin que je parcours en sirotant mon thé matinal sur le balcon d’un hôtel de Chennai, page sciences, un article sur l’alimentation des Américains.

Les Etats-Unis, le pays où les pauvres sont obèses…

En Inde les pauvres n’ont pas l’outrecuidance d’être obèses, même pas gros, ils sont maigres, droits, dignes et leurs yeux brûlent de mille et une fièvres. Ils marchent pieds nus dans la poussière, dorment sur les trottoirs où dans de misérables baraques, se lavent dans les rivières et se nourrissent de riz, de chappattis et de légumes épicés. Ils ont la peau sombre, presque noire, les femmes portent des saris de coton dont les couleurs ont fané au soleil et les hommes ceignent leur hanches d’un simple dhotî. Ils ont un sourire éclatant, qu’un rien fait naître, ils sont joyeux, curieux, même le lépreux tendant ses moignons se met soudainement à rire, parce que ma peau est blanche, que je lui ai parlé et que Fabio l’a filmé, il se regarde avec bonheur dans le petit écran de la caméra et il rit de se voir si laid.

En Inde, ce sont les riches qui sont gros, pas les très riches bien sûr, pas les ingénieurs hyper doués de Bangalore, ni les financiers ou professeurs de Delhi ou de Bombay, non, ce sont les nouveaux riches, ceux qu’on définit comme faisant partie de la classe émergente, ceux qui après d’interminables générations de semi pauvreté accèdent enfin à une certaine opulence et entendent bien le faire savoir qui affichent des formes plus que généreuses.
Passée la quarantaine les femmes explosent dans leurs saris brodés, portant majestueusement leur bedaines gonflées elles ont la démarche fière et la parole coupante. Elles ont gardé la joie et la curiosité, mais sont devenues plus méfiantes et plus hautaines, il faut les séduire, les regarder avec respect, leur sourire pour que leurs visages s’éclairent, elles deviennent alors intarissables et dans un anglais encore plus approximatif que le mien, me pressent de questions, elles veulent savoir si j’ai des enfants, si nous sommes mariés, si j’aime la couleur de ma peau, ce que je pense de l’Inde et de sa nourriture, et moi je réponds « Oh, I love India, Indias’food is great, very hot, but delicious ! » et ça les fait rire. Puis je leur parle du cinéma indien, de Rani Mukerjee et du beau Shah Rukh Khan, alors elles balancent la tête de droite à gauche. Nous nous saluons enfin d’un « Bye, bye, nice to meet you ! », un dernier signe de la main, un dernier regard amusé, et nous nous séparons, riches d’une nouvelle rencontre.

India, le 29 juin 2006

   
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Claudine Tissier & Fabio Campo