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Autres pays, autres mœurs ! |
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Ils sont venus, ils sont tous là,
dans notre chambre d’hôtel, à 10 heures tapantes : Priya et Vishnu,
qui pour l’occasion ont séché l’école, la délicieuse Janaki dans un
beau sari coloré et Daddy. Nous qui espérions passer la journée
seuls avec les filles, c’est raté.
Daddy entreprend de planifier les activités de la journée et
recommence à insister avec le temple. Nous déclinons la proposition,
ou plutôt, rusés, nous la programmons pour l’après-midi, si il nous
reste assez d’énergie, et pour le matin, nous aimerions bien, si
c’était possible, qu’ils viennent nous donner un coup de main pour
réserver notre billet de train pour Bangalore où nous irons
après-demain, ensuite, connaissant les goûts de Priya, je suggère de
faire du shopping. Elle me regarde avec les yeux brillants. Daddy,
tout en déplorant que l’expédition gare n’ait pas eu lieu deux
heures plus tôt – il y aurait eu moins de monde - accepte le
programme.
Nous quittons la chambre, et pris par l’incessant discours de Daddy,
la tête à l’envers, nous oublions les clés à l’intérieur. Remue
ménage ! Je lis dans les yeux de Daddy qu’il se demande, avec une
affection inquiète, comment on arrive à s’en sortir quand on est
seuls : pas foutus de réserver un ticket de train, pas foutus de se
lever avant 9 heures, et même pas foutus de penser à prendre la clé
quand on sort !
Bon, on va essayer de se rattraper ! |
Priya, Vishnu et Janaki |
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Comme Daddy l’avait annoncé à plusieurs reprises la
gare est pleine et il y a la queue devant les guichets de réservation.
L’Indian Railway est la plus grande entreprise du monde : environ un
million et demi d’employés, un réseau énorme qui permet d’aller partout,
de rejoindre les villes les plus éloignées du pays. Les trains sont très
économiques, presque ponctuels, dans un état acceptable et sûrs. Le seul
problème est la complication du système : nombreuses classes, nombreux
types de trains et horaires fantaisistes.
Pour faire la queue nous nous asseyons en rang d’oignons sur des sièges
en plastique. C’est une queue assise. A chaque fois qu’un guichet se
libère, les cinquante personnes qui attendent se lèvent et hop, vont
s’asseoir sur les chaises voisines qui viennent d’être libérées et ainsi
de suite jusqu’au but final. De loin ça donne une impression de chaises
musicales, de près c’est rigolo à regarder mais c’est aussi une très
bonne idée car dans les queues « normales » les indiens sont
particulièrement indisciplinés, surtout à l’approche du guichet ou du
comptoir, si on laisse le moindre espace ils s’enfilent, à droite, à
gauche et dament le pion au pauvre touriste qui a du mal à comprendre la
manœuvre.
La réservation faite Daddy hèle un taxi et nous expédie Priya, Vishnu,
Janaki, Fabio et moi, vers la rue des centres commerciaux. Lui doit
travailler, il nous rejoindra pour déjeuner.
Nous flânons dans les boutiques, vêtements, bijoux, casseroles en inox,
soieries, colifichets. Sans Daddy, Janaki et les filles sont beaucoup
plus bavardes et nous font quelques confidences. « Next year, dit Janaki
qui ne connaît que quelques mots d’anglais, Priya wedding » Voilà qui
m’intéresse ! Je demande immédiatement « Arranged marriage ? »
« Oh Yeees ! » répondent en chœur et avec enthousiasme la mère et les
deux filles. Et de m’expliquer que les recherches du futur époux ont
déjà commencé avec l’aide de divers intermédiaires : voisins, famille,
relations… etc.
J’interroge Priya, n’aurait-elle pas préféré choisir seule, n’a-t-elle
pas d’amis, de garçons dans son école ou dans son entourage ? Si, elle
en connaît, mais le mariage arrangé c’est beaucoup mieux. Pourquoi ?
Parce que Daddy va décider et que Daddy ne peut pas se tromper, et puis
il ne va pas choisir seul, Janaki et les filles vont l’aider, à eux
tous, il feront le bon choix.
Finalement le discours qu’elle me tient est en tout point semblable à
celui de Taoufik, le copain de Johny de Trichy et probablement très
représentatif. Cela correspond tout à fait aux romances des films Hindis
de Bollywood ou de tout autre cinéma indien.
Non seulement Priya ne se révolte pas contre ce mariage, comme on a
tendance à imaginer qu’on le ferait à sa place, mais elle en est ravie.
Autres pays, autres mœurs.
Daddy nous rejoint au restaurant, il est deux heures, tout le monde est
fatigué, et magnanime, il annule la visite du temple. Ouf !
Nous rentrons à l’hôtel nous reposer, nous retournerons chez nos amis ce
soir pour les interviewer pour le documentaire.
(...à suivre)
India, le 25 juillet 2006 |
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Vishnu et Janaki |
Shopping Center à Coimbatore |
Plus de photos:
Priya et sa famille |
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