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Sur la route de Coimbatore

Lors du mariage auquel nous avions été invités à Chennai en aout 2005 nous avions rencontré le délicieux Pandjanadane de Karaikal et nous avions fait la connaissance de Priya, une jeune fille de 19 ans. Ils ne se connaissent pas, le premier appartient à la famille du marié et la seconde à celle de la mariée, mais ils ont un point commun, ils sont brahmanes, tout au moins le père de Priya l’est. Les femmes appartiennent d’abord à la caste de leur père, puis à celle de leur mari, ce qui ne change rien au résultat final, les mariages inter castes étant très rares. Environ 80 % des unions sont des mariages arrangés, et donc respectent scrupuleusement l’ordre établi.
La famille de Priya habite à Coimbatore, une grande ville située légèrement en hauteur toujours dans le Tamil Nadu, mais très proche du Kerala et du Karnataka.
Les deux seuls trains joignant Trichy à Coimbatore étant l’un trop matinal (il part à 4 heures), l’autre trop tardif (il arrive à 22 heures), nous décidons de prendre un taxi, ce qui est toujours épuisant, car notre confiance envers les chauffeurs et les conducteurs de tous les véhicules rencontrés lors du trajet est très limitée.
L’état des routes est souvent approximatif et le style de conduite des Indiens… indien !

L'Ambassador

La route suit le fleuve Cauvery. De la fenêtre de la voiture nous apercevons, cachées parmi les feuillages, les femmes faire leur toilette, leur lessive ou leur vaisselle dans ses eaux. De larges marches, les ghats, mènent à l’eau et afin de préserver l’intimité féminine, les deux sexes sont séparés.
Autant les femmes sont pudiques, autant les hommes ne le sont pas. Quand ils se baignent ils enlèvent sans complexe leur dhoti et exhibent au grand air leurs fesses brunes et leurs attributs virils. Il n’est pas rare non plus de les voir accroupis au bord de la route ou au milieu d’un champ occupés à déféquer, (ou à uriner, chose curieuse ils ne font pas pipi debout).
Les canaux qui longent la Cauvery sont calmes et bordés d’arbres, ils évoquent la fraîcheur et le bien être et nous aimerions nous laisser nonchalamment guider par le courant. Malheureusement nous sommes pas dans une modeste barque mais dans une Ambassador blanche qui zigzague vaillamment entre les innombrables embûches de la route : autobus, camions, motocyclistes, cyclistes, piétons, trous et ce voyage ce révèle un des plus risqués que nous ayons jamais faits.
D’abord à cause des camions, innombrables, qui alimentent en sable une énorme fabrique de ciment, sable puisé dans le lit de la Cauvery, au mépris de toute prudence écologique. Dans les années 70 / 80, en Italie (et certainement ailleurs), les lits des fleuves ont été consciencieusement pillés, depuis les inondations et ravinements sont continuels. Mais penser que les erreurs de l’occident puissent être analysées et bannies par les pays émergeants et probablement du domaine de l’utopie.
Bien entendu ces camions roulent trop vite, doublent sans arrêt et sans regarder et les accidents sont fréquents, comme en témoigne l’un d’entre eux, renversé sur le bord de la route après avoir percuté une moto.
Les motos ! Eux aussi, et les deux roues en général, auraient bien besoin qu’on leur explique deux ou trois notions de base du code de la route : regarder derrière soi quand on déboîte, utiliser un clignotant, mettre un casque… etc.
Mais le pompon de la dangerosité est sans nul doute détenu par les autobus qui, sans retenue aucune, font la course entre eux ! La concurrence étant sévère entre les bus gouvernementaux et ceux des compagnies privées la lutte est sans merci et tous les coups sont permis pour remplir au maximum les sièges : dépassements hasardeux, vitesse inconsidérée. Le résultat de cette lutte effrénée nous apparaît lui aussi sous la forme d’un accident, bus couché sur le côté, camion enfoncé.
Bref un voyage pénible, ponctué par d’incessants coups de klaxon, mais qui se termine bien. Contrairement à toute attente, nous arrivons à bon port et ce soir, Priya et sa famille, doivent passer à notre hôtel.

India, le 23 juillet 2006

(... à suivre)

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Claudine Tissier & Fabio Campo