En un an Trichy a changé. Cette grande ville au nom
imprononçable de Tiruchirapally, qui compte près de 900 000 habitants,
et est située à l’intérieur du Tamil Nadu, s’est enrichie de façon
spectaculaire.
Un supermarché flambant neuf et très bien achalandé a ouvert ses portes
dans l’enceinte de notre hôtel, le Femina. La foule s’y presse avec
délectation pour remplir paniers en plastique et chariots clinquants. Je
lis dans les yeux des enfants le même émerveillement que j’ai ressenti,
à 10 ans lorsque pour le première fois je suis entrée dans un tel lieu.
Emerveillement qui m’a quitté depuis longtemps faisant place à l’ennui,
souvent même de la répulsion : supermarchés aseptisés, produits clonés,
air conditionné, OMG, gaspillage de papier et de plastique, froid,
musique neutre, pas un sourire.
Les femmes portent des saris brodés, les étoffes sont lourdes et
coûteuses, et elles sont parées d’or. J’ai même vu 2 jeunes filles en
jean.
Mais le nombre de musulmanes en hijab a lui aussi augmenté. J’entends
par hijab (peut être à tort) le long manteau noir qui les couvre des
pieds à la chevelure ne laissant apparaître que le visage, voire même
que les yeux.
J’aimerais savoir si ce sont des femmes, jusqu’alors recluses, qui ont
enfin la possibilité de sortir, comme me l’a expliqué un marchand
cachemiri musulman de Chennai, ou si au contraire un retour de bâton de
l’ordre musulman les contraint à se voiler et aliène leur liberté. |
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Le bazar aussi a changé, il paraît plus propre, les
échoppes regorgent de marchandises et il n’y a pratiquement pas de
mendiants.
A Trichy, nous devons retrouver Mohammed, le
directeur du département français du Djamal Mohamed College dont nous
avons fait connaissance l’année dernière. Nous étions allés avec lui au
College et j’avais donné une leçon de français (mémorable) à ses
étudiants.
Nous voulons aussi partir à la recherche du jeune homme du train. Nous
l’avons rencontré il y a un an dans un train, comme son surnom
l’indique, à peu de distance de Trichy. Nous avons échangé des lettres
et des mails, mais mon dernier courrier, annonçant la date de notre
visite est resté sans réponse. Comme il n’a ni téléphone ni ordinateur à
domicile nous envisageons de nous rendre à l’adresse que nous avons, à
environ 2 heures de train de Trichy, en espérant le trouver. Nous
connaissons bien sûr son nom, il s’appelle Riaz Ahmed, et nous espérons
vivement le rencontrer, car en plus de la sympathie qu’il nous inspire,
nous avons apporté de France, à sa demande, une méthode de français, un
dictionnaire français-anglais et un dictionnaire latin-anglais, dont
nous aimerions bien débarrasser nos valises, la culture ça pèse !
Mais voilà que les destin nous est favorable, flânant dans la rue à la
recherche d’un internet café, une voix nous interpelle : « Mister Fabio,
Mister Fabio ! », c’est lui, Riaz Ahmed, le jeune homme du train en
personne, venu à la ville acheter des chaussures et qui attribue à Allah
le hasard de notre rencontre. Il est en chemin pour la gare et a peu de
temps, nous convenons de lui rendre visite à son village, Mayanoor, dans
deux jours.
Puis nous téléphonons à Mohammed pour dîner ensemble.
Quelques heures plus tard, Johny Basha et Toufik, deux élèves de
Mohammed avec qui nous avions particulièrement sympathisé, passent à
notre hôtel pour nous saluer, nous prenons rendez-vous avec eux pour
samedi après-midi.
Ça y est, notre emploi du temps est plein « Et dire qu’on nous croit en
vacances ! » soupire Fabio.
India, le 17 juillet 2006 (...
à suivre) |