02.07.2006
Si les anges existent j'en ai rencontre' un...
Peter est beau, quand il se déplace entre les tables du restaurant français qu’il dirige, dans une calme rue ombragée du quartier français de Pondy, il semble glisser, souriant et aérien, mais son regard est vif et rien ne lui échappe.
Les femmes le suivent langoureusement des yeux, séduites par sa grâce et sa jeunesse, il a 24 ans, mais les serveurs indiens, toujours prompts à la taquinerie et au laisser aller, le respectent.
Les sourires qu’il adresse aux clients n’ont rien d’artificiel, Peter l’Indien, fils d’un couple de missionnaires évangélistes protestants moitié Sri Lankais, moitié anglo- indien descendant d’esclaves émigrés à Trinidad pour trimer dans les plantations de canne à sucre, est peut être un ange, un Krishna, sensuel et rieur, à la voix douce et au regard malicieux, ou un Mowgli innocent qui à 17 ans, pour honorer une promesse faite à une jeune fille a décidé de quitter Pondichéry pour affronter Paris.
Quand je lui demande quel accueil il a reçu en France, il me répond en riant : « No comment !! », puis il m’explique, dans un français chantant, qu’il y a du bon et du mauvais partout, et que les difficultés l’ont aidé à comprendre et aimer les autres. Il affectionne une formule : « no gain without pain».
Il a déjà vécu plus d’expériences que d’autres en une vie entière et il les raconte simplement, joyeusement, comme de simples épisodes.
Il a préparé un BTS de restauration au prestigieux Maxim’s de Paris, une africaine fortunée lui a prêté un appartement dont il laisse la porte ouverte pour qui a besoin, il est parti pour le Chili rejoindre une fille française qu’il aimait, avec dans ses bagages un gâteau pour son anniversaire, mais la belle avait déjà un autre amoureux, son cœur s’est brisé et il a erré dans les rues de Santiago avant d’être recueilli par des enfants avec qui il est resté 8 mois, avant de revenir en France finir son BTS, et travailler à l’ambassade, et filmer avec son frère un documentaire sur la célébration de Pangal, cette fête sacrée où l’on saoule les vaches et faire des photos de mode et rencontrer une Chilienne avec qui il va dans quelques mois monter un restaurant indien, le premier dit-il fièrement avec la joie d’un gamin, à Santiago, parce qu’il a donné sans compter et que le destin le lui rend, et être sollicité par le patron français du Satsanga de Pondy pour superviser le restaurant, enseigner la cuisine et le service aux employés, apporter, dans ce cadre verdoyant la lumière qu’il irradie.
Toutes les filles lui tournent autour, mais il aime les blondes, nordiques, libres et fortes. Il veut que celle qui partagera sa vie partage aussi sa croyance et ses convictions, qu’elle aime les enfants et son voisin, comme le dit la bible qu’il aime citer.
La vie parisienne lui a appris la tolérance, et à respecter et aimer les femmes, avant une épaule dénudée le choquait, maintenant il accepte et comprend, et c’est le modèle de soumission féminine indienne qui lui semble injuste et obsolète.
Quand il voudra se marier, il suivra le conseil de sa mère, il emmènera la future candidate au marché et il regardera avec quelle attention elle choisira les produits, comment elle saura doser autorité et humilité pour négocier les prix. Une belle Walkyrie saura-t-elle franchir cette épreuve?
Et puis avec les gains du restaurant de Santiago il voudrait monter une association pour venir en aide aux enfants démunis, et aussi écrire et réaliser avec son frère un film bollywoodien qui retracerait sa difficile vie en France, par pour la gloire, non, Peter se fiche de la célébrité, ce n’est pas son problème qu’on le reconnaisse dans la rue, mais pour faire comprendre aux jeunes indiens tentés par l’immigration européenne, que c’est un miroir aux alouettes et que contre quelques euros ils pourraient bien y perdre la sérénité de leur âme.
Et il me parle encore et encore et je suis fascinée par ce mélange de douceur et de force, d’ingénuité et de détermination et il m’explique qu’il faut prendre le meilleur de l’Occident et le meilleur de l’Asie, pour enfin trouver la paix que chacun porte au fond de son cœur, même si il ne le sait pas encore et je le crois parce que j’ai envie de le croire, et qu’un monde qui lui ressemblerait serait doux à vivre.
Pondichéry le 2 juillet
13:35 Publié dans Chronique indienne | Lien permanent | Commentaires (2) | Envoyer cette note
Commentaires
belle histoire - et j'aime ta relation - et j'aime la sagesse de la mère (je n'aurais pas franchi cette étape au temps de ma splendeur, ou disons en mon jeune temps)
Ecrit par : brigetoun | 02.07.2006
ha ha... incroyable je me penche ici pour de l'exotisme, suivre une voyageuse en Inde et voilà que l'histoire me rejoint au Chili !
Très beau portrait...
Mais mais mais, où est donc son restaurant à Santiago que j'y fasse la rencontre de l'ange ?
Ecrit par : bertrand | 11.07.2006
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