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23.09.2006

Départ

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Voilà les valises sont faites. Obsédés par le spectre du dépassement de poids, qui coûte fort cher, nous avons le plus possible chargé les bagages à main, dont la merveille acquise hier.
Et le temps s’étire.
Dernier dîner au restaurant du New Woodlands. Là, mon honnêteté me suggère de préciser que si la nourriture indienne est excellente, variée, bien cuisinée, et légère elle est aussi incroyablement épicée, incroyablement hot. Le feu dans la bouche, et ailleurs le lendemain. Deux mois, c’est fatigant !
Et même lorsque l’on spécifie au serveur « No hot please ! » et que celui-ci répond en riant « Yes, yes, no hot », ce qui arrive dans l’assiette emporte les papilles. Normal, il semblerait (lu chez les scientifiques) que le piment soit présent dans le liquide amniotique, les bébés indiens seraient donc, dès avant la naissance, accoutumés à sa saveur. Fabio, élevé à la pasta, et moi, nourrie à la soupe de légumes berrichonne, souffrons donc d’un sérieux handicap en la matière.
Tiens, ultime anecdote gastronomique :
Ce soir même, au restaurant de l’hôtel, nous voulions terminer notre repas par une petite salade de fruits, histoire de ramener nos palais à une température acceptable. Le serveur, serviable, nous a suggéré une variante indienne de ladite salade « Very good, very good ! » et piégés par son sourire nous avons obtempéré. Oh, certes la coupe en verre, piquée de deux cuillères, qu’il nous a apporté quelques instants plus tard contenait bien des fruits : mangues bananes, raisin et pommes coupés en dés et assaisonnés… avec du curry et du piment.
Et sous l’œil ravi de « Very good, very good ! », nous avons tout mangé, bravement, sans rien dire, la larme à l’œil. Pourquoi? Il voulait nous faire plaisir et c’était le dernier repas !

medium_chennai17.jpgNous somnolons en attendant l’heure fatidique. Doublement, triplement fatidique pour moi qui hais les voyages aériens.
Prendre l’avion me terrorise.
Je n’ai pas peur, j’ai simplement la conviction irrémédiable et absolue que je n’arriverai pas vivante à destination.
C’est lourd.
Mais, par miracle, l’envie de découvrir le monde a toujours été la plus forte. Pendant des années j’ai fait des voyages horribles : seize heures d’affilée l’œil grand ouvert, agrippée à l’accoudoir, les fesses serrées, à épier les bruits des moteurs le cœur palpitant, à guetter le moindre signe de panique sur les visages des hôtesses, épuisant.
Et puis j’ai trouvé la parade sous la forme de gouttes, bien chimiques, prescrites par mon médecin compatissant et qui transforment les vilaines molécules d’angoisse que secrète mon cerveau d’abord en bulles de rire puis en profond sommeil. Arrivée dans l’avion j’accentue le divin effet par un verre d’alcool fort ou une petite bouteille de Bordeaux, et je dors.
Pendant ce temps là le pauvre Fabio voyage tout seul. Nulle n’est parfaite !

L’aéroport est bondé. Et bien que notre avion ne décolle que dans trois heures il y a déjà, tout là bas, la queue au check in de British Airways. Et les contrôles commencent : des valises, des sacs, des billets, des passeports. Et encore et encore.
Au bout d’une heure de queue, le guichet de l’hôtesse de l’enregistrement quasiment à portée de main, une jeune fille en uniforme s’approche de nous pour nous signaler que nous n’avons droit qu’à un seul bagage de cabine par personne, et petit s’il vous plaît.
« Only one ???? »
Mais nous avons toujours voyagé avec deux bagages à main chacun ! Comme tout le monde. Suffit de regarder autour de nous. Tiens « cazzo ! », justement autour de nous les futurs passagers vident les petits sacs, et font quoi du surplus ? Ben rien, que peuvent-ils en faire ? Les valises sont sécurisées, interdit de les ouvrir.
Alors ils abandonnent le paquet de biscuits, le pullover supplémentaire, le pot de lentilles au masala.
A partir d’aujourd’hui, qu’on se le dise, par crainte des lentilles piégées, British Airways a pris des mesures de sécurité.
La demoiselle est inflexible, il ne reste qu’une solution : expédier la merveille de sac tout neuf dans la soute.
Dans la soute !!!
Tout neuf !!!
En plus, c’est sûr, on va dépasser les 46 kilos autorisés.
Résignés, il nous vient l’idée de protéger la merveille en la faisant envelopper dans un film plastique.
Erreur (voir la photo).

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Et le temps passe, et on piétine, on attend, on ouvre le sac, on ferme le sac, on sort le passeport, on range le passeport, on ouvre le sac, le policier en sort un tampax et me l’agite sous le nez d’un air interrogateur, j’explique.
Les cosmétiques et les liquides sont interdits dans l’avion.
Privés de dentifrice.
Je sauve mes gouttes en expliquant, preuve en main qu’il s’agit d’un médicament.
Et ça continue.
Fouille corporelle, deux fois.
Et à ce moment là, je me dis que les terroristes ont gagné. Ils ont semé la peur, la paranoïa.
Et encore, nous avons la chance d’être deux occidentaux, blancs et quinquagénaires, qui de toute évidence rentrent de vacances.
Je n’ose imaginer comment sont traités, dans les grands aéroports occidentaux, les non-blancs, non occidentaux, non-chrétiens.

Nous sommes entrés dans l’ère de la peur.
Pendant deux mois nous l’avions oubliée.

India, le 29 aout 2006

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Commentaires

on ne vous a pas fait vous déchausser ?
moi je n'ai pas peur en avion, mais j'aurais du mal pour un long trajet because circulation dans les jambes et pour la nourriture indienne je serais une plaie ; j'aime les épices mais maintenant ça correspond à trois jours à plat ventre. Donc me contenter de voyager par procuration.
Je n'étais pas sure d'avoir reconnu la merveille sur la première photo mais j'avais gagné

Ecrit par : brigetoun | 23.09.2006

Oui, les voyages deviennent bien éprouvants. Ou est passée la fête au-dessus des nuages qu'on a connue dans un passé pourtant pas si lointain ?

Ecrit par : amarula | 23.09.2006

Je ne suis donc pas seule à avoir peur dans l'avion ?

Ecrit par : tanette | 23.09.2006

Depuis 5 ans maintenant j'ai une peur bleue, les trous d'air m'ont donné un ulcère, depuis je ne voyage qu'en train et donc en France. Trois jours après notre retour de Chypre l'année dernière, le même avion pris par ma fille et moi deux mois auparavant, s'explose à Larnaca.

Un vrai trumatisme. Cet avion nous ne l'avion pas pris pour aller à Chypre mais deux mois avant à destination et en provenance de Corfou.

Je comprends ta peur, je ne sais pas si je vais être capable de reprendre l'oiseau de fer.

Ecrit par : Human | 23.09.2006

est ce que tu as remarqué Céleste que les restaurants "chics" en Inde sont plongés dans la pénombre ? je ne comprends pas pourquoi ? celà m'a valu un jour de commander un plat de "spaghetti with vegetables ", pour enfin calmer le feu aussi , l'assiette est arrivée et dans la pénombre j'ai vu des haricots verts qui parsemaient le dessus du plat , délire : c'étaient des piments verts que j'ai croqué gouluement , résultat : pas moyen d'avaler quoi que ce soit pendant 2 jours

Ecrit par : joline | 24.09.2006

Merci pour vos com.
le mien:
Oui, Brigetoun, a fallu enlever les chaussures, mais comme l'été j'ai toujours des Birkenstocks (genre tong), ça n' a pas été un problème. par contre, quand je suis allée à Paris à Pâques, j'ai dû retirer mes bottes ( un genre de santiags sans fermeture éclair) et, remettant la gauche, en équilibre instable sur le pied droit, j'ai enflilé précipitamment mes orteils dans un trou de la doublure (que j'avais eu la flemme de réparer) le trou est devenu une énorme fente, impossible de remettre la maudite botte!
j'ai clopiné misérablement jusqu'aux chaises les plus proches (elles étaient fort loin) sous les regards amusés des autres voyageurs.
moralité: quand on prend l'avion, penser, aussi à mettre des chaussures faciles à remettre!

@Amarula
ayant peur de l'avion, ce ne fut pour moi jamais une fête, mais
aujourd'hui, c'est devenu pénible pour tout le monde

@ Tanette, tu n'es pas la seule, j'en connais d'autres!

@ Human
trop dommage de se priver de voyages lointains!
je te conseille les gouttes magiques, ça marche!

@ Joline
et oui, les restaurants indiens chics sont sombres et il y règne un froid quasi sibérien, la clim est poussée à fond, et on ne voit pas ce qu'on mange.
Pour trouver une ambiance agréable , c'est difficile.
Ceci dit, une seule fois nous sommes allés dans le "très chic" et c'était parfait.
sinon, les gargottes

Ecrit par : céleste | 24.09.2006

Difficile, mais nécessaire transition

se retrouver dans l'Europe assiègée par les méchants terroristes
sans le sas de ce rite
aurait peut-être été bien douloureux ?

Sinon
(!) J'ai ri en pensant à la salade relevée et aux grimaces contenues
oui je sais
ce n'est pas bien de sourire du malheur d'autrui
mais c'est un peu la faute du narrateur ... non ?

Ecrit par : Luc Comeau-Montasse | 24.09.2006

Les commentaires sont fermés.

 
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