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06.09.2006

Marie Claire, Inde

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Début Juillet, à Chennai, j’avais tenu entre mes mains le premier exemplaire de Marie Claire Inde, daté de Juin 2006. Poussée par la curiosité je l’avais feuilleté, rapidement j’en conviens. Je me souviens d’un article sur les Japonaises qui payent de beaux mâles vigoureux pour leur défloraison, palpitant et remarquablement bien adapté à la psychologie féminine indienne, et d’une double page, non moins passionnante, sur Karl Lagerfeld. Je m’étais alors demandée combien d’Indiens, sur la bagatelle d’un milliard et cent millions, avaient une idée, même vague, de qui est  l’homme au catogan. Par ailleurs qui donc en Inde pouvait bien acheter un canard tellement occidental, stéréotypé et cher ?

medium_marieclaire2.jpgEt bien voilà que la réponse à ma question vient de s’asseoir juste en face de moi, dans un wagon plutôt coûteux (dans les wagons économiques les rats font la courses aux cafards, on a du mal à s’y habituer), du train de nuit Ernakulam-Trichy, le magazine sous le bras. Elles sont deux, deux jeunes et jolies femmes vêtues de churindars raffinés et bien coupés. L’une est en jaune, l’autre en gris pâle délicatement brodé.
A peine arrivées dans le train, mécontentes de leurs couchettes, elles ont demandé en anglais à l’employé des chemins de fer de les leur changer vite bien fait. C’est fait, elles sont maintenant en face de moi destinées à s’étendre l’une sur la couchette du haut, l’autre sur celle du bas où elles se sont assises.
Le petit gros à moustaches et lunettes qui somnolait sur la couchette située sous la mienne, se redresse d’un coup, soudain ragaillardi. La jeune femme en jaune m’adresse gentiment quelques mots en français. Nous discutons cinq minutes. J’apprends qu’elle travaille à Bombay, dans une société de design dont elle me recommande le site web et que son amie vient de Bangalore. Le petit gros se frise les moustaches et intervient dans la discussion. Comme je suis au-dessus et qu’ils parlent en très bon anglais la teneur de la discussion échappe malheureusement à mes oreilles curieuses. Mais, les entendant rire, surtout lui, je comprends qu’ils sympathisent.
Dix minutes plus tard, alors qu’ayant renoncé à suivre leur discussion, qui par ailleurs ne me regarde pas, je suis immergée dans l’extraordinaire Bombay parsie de Rohinton Mistry, j’entends les deux jeunes femmes remercier chaleureusement le petit gros à moustache et hop, celui-ci, galant homme, libère sa couchette pour l’offrir à Miss Jaune. Il grimpe ensuite fièrement à l’échelle pour venir, avec le sourire, s’étendre sur la couchette du haut.

Le lendemain matin, arrivé à Trichy, il trotte devant elles et les aide à porter leurs valises.

Nous nous retrouvons tous à la réception du même hôtel. Miss Jaune, sûre d’elle, s’adresse aux employés d’un ton autoritaire, elle veut ci et ça et autre chose. Le petit gros intervient pour transmettre en tamil les propos de l’élégante. Puis il les accompagne à l’agence de voyage où il négocie pour elles la location d’un taxi. La chose faite, un dernier sourire et un hochement de tête (hochement, pas balancement, les Indiens riches ne balancent plus la tête et ne s’asseyent plus sur leurs talons) et les deux belles s’en vont, le laissant, gros nigaud dépité, seul sur le trottoir.

Chapeau les filles !
Vous avez un tout petit peu vengé les Princy.

Attention, je ne veux pas dire que la lecture de Marie Claire permet aux femmes de se libérer de la soumission imposée par le mâle dominateur. Si c’était le cas, ça se saurait.

Mais, pour la première fois depuis que je voyage en Inde, j’ai rencontré des jeunes femmes dont le comportement est différent. Des jeunes femmes qui lisent des magazines occidentaux, qui travaillent dans des sociétés internationales, qui parlent anglais entre elles et qui sont à des années lumières de la petite Mary de chez Rajesh.

L’Inde a un taux de croissance annuel de 8% mais, pour permettre à une élite de s’enrichir encore et encore, 79,9% des Indiens se contentent de moins de deux dollars par jour. Ici et là, la révolte commence à gronder et les terroristes se posent aussi comme sauveurs des pauvres.

India, le 27 aout 2006

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Commentaires

est ce que, comme dans l'Europe des 18ème et 19ème, il y a une plus grande liberté chez les très pauvres où la main d'oeuvre des femmes est importante, ou les très riches ? avec l'immense entre deux (pas encore classe moyenne) de soumission féminine ?

Ecrit par : brigetoun | 06.09.2006

@ brigetoun

très bonne remarque;
c'est vrai les femmes très pauvres ont plus de liberté de mouvement, elles travaillent et parfois gèrent elles mêmes leurs gains.
les femmes intouchables, par exemple, sont souvent porteuses sur les chantiers. elles travaillent avec des hommes, dans la bonne humeur et visiblement ceux-ci les respectent.

En ce qui concerne les très riches, j'imagine qu'elles ont aussi beaucoup de liberté, mais je n'en connais pas.

Ecrit par : céleste | 06.09.2006

"Pourquoi es-tu venue au monde, ma fille, quand un garçon je voulais ?
Vas donc à la mer remplir ton seau : puisses-tu y tomber et t’y noyer".

Chanson populaire de l’Inde

Je signale un texte sur la condition de la femme en Inde:

http://lesogres.org/article.php3?id_article=2302

Ecrit par : uninstantpour | 06.09.2006

La similitude de tous ces mondes( Orient, Maghreb, Proche Orient, Asie)
c'est malheureusement l'infériorité de la femme.
Il y a deux mois environs c'est le magazine Elle qui s'est implanté en Arabie Saoudite. La femme occidentale est enviée par ces femmes oprimées, innaccessible aussi. La télé a elle aussi par le biais de la parabole, pour certains pays changé les mentalités des femmes. Elles savent, mais n'osent pas, parce qu'elles ne peuvent pas.

Ecrit par : Human | 06.09.2006

L'occidentalisation galopante a des effets pervers insoupconnés... modernité.progrès mais surtoput disparité et discriination.. soit une radicaisation des rapports humains entre les bénéficiaires et les laisser-pour-compte...
Et la pesse magazine n'est qu'un vecteur de propgande publicitaire...

Ecrit par : bertranD | 07.09.2006

et bientôt j'achète un bon clavier !!

Ecrit par : bertranD | 07.09.2006

@human

oui, le constat est dur et ces femmes, écrasées par les hommes ont peur, dans certains pays, comme l'Egypte et bien d'autres, leur condition a régressé ces vingt dernières années de façon inquiètante

Ecrit par : céleste | 07.09.2006

Pourquoi accuser l'occidentalisation ??? L'occident est au contraire une fenêtre d'espoir pour bien des gens dans ces pays pauvres.
Et les magazines sont un moyen plus pacifique pour diffuser le principe d'égalité entre les hommes et les femmes et la démocratie que les bombes de Monsieur Bush !

Ecrit par : poilagratter | 07.09.2006

@ un instant pour

le texte que tu cites reflète malheureusement la vérité.
Les chiffres sont un peu vieux.
En ce qui concerne l'élimination des foetus féminins, l'Etat a désormais interdit aux médecins d'indiquer aux parents le sexe du futur bébé. il y a bien sûr des médecins qui ne respectent pas la loi, mais si ils se font prendre la note est très salée.
Disons que cette loi marque quand même un progrès

Ecrit par : céleste | 07.09.2006

Je retiens une chose de ce texte : les trois occupants indiens du compartiment parlent entre eux en anglais. Quelle en est la raison ?

- Celle qui faisait que l'élite intellectuelle russe ne communiquait entre-elle qu'en français jusqu'à la révolution, c'est à dire un signe extérieur d'appartenance aux classes supérieures ?

- Le fait que le pays étant immense, les dialectes y sont forcément nombreux et que pour se comprendre il faut avoir recours à une langue véhiculaire, donc l'angais, comme presque partout ailleurs dans le monde.

Ecrit par : poilagratter | 07.09.2006

@poilàgratter

les deux réponses sont valables

l'anglais et l'hindi sont les deux langues officielles. chaque état a sa propre langue, qui sont des langues et non des dialectes (il y a aussi des dialectes)
mais pour accéder à la maîtrise de l'anglais il faut avoir étudié, de préfrérence dans une école privée c'est donc quand même un signe d'appartenance aux classes supérieures

Ecrit par : céleste | 07.09.2006

J'ai lu récemment ( sur un blog peut-être) que Victor Hugo aurait dit : "l'homme possède une clé grâce à laquelle il peut remonter sa femme chaque jour " ...

Ecrit par : amarula | 07.09.2006

La phrase exacte est : "L'homme a reçu de la nature une clé avec laquelle il remonte sa femme toutes les vingt-quatre heures"... c'est d'une exquise élégance, isn't it ?

Ecrit par : poilagratter | 07.09.2006

encore faut-il savoir utiliser sa clé..
;-)))

Ecrit par : bertranD | 08.09.2006

@ Et oui, Bertrand, tu soulignes ici un point d'importance capitale!

L'abruti macho, fier de ses attributs, commet souvent au lit de piètres performances.

Ecrit par : céleste | 08.09.2006

Les commentaires sont fermés.

 
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